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Confidentialité des données de la recherche

Science | Affiché 828 fois | Publié le mardi 15 septembre 2020 à 11:32 | gdr@inrs.ca


Depuis quelques années, on entend souvent parler de « L’affaire Maillé » : en 2015, Marie-Ève Maillé témoigne dans un recours collectif contre le promoteur d'un projet d’éoliennes dans le Centre-du-Québec. Après qu’elle ait déposé en appui de son témoignage sa thèse doctorale sur l’acceptabilité sociale du projet, on exige qu’elle communique le nom des toutes les personnes qu’elle a rencontrées, les transcriptions d’entrevue, des listes, etc. Bref, si vous aviez été dans ses souliers, on vous aurait demandé de bafouer la confidentialité accordée aux participants, d’aller à l’encontre des règles d’éthique de la recherche des trois conseils et de l’INRS. Elle s’est battue en cour et, finalement, elle n’a pas eu à divulguer ses données de recherche. Elle a donné de nombreuses entrevues, notamment dans Affaires Universitaires et à Radio-Canada et publié son histoire aux Éditions Écosociété.

Le 18 août dernier, Jean-René Roy et Me Richard Ramsay reviennent sur la question dans Affaires Universitaires. Les auteurs trouvaient pertinent de ramener à l’avant-plan cette question en ces temps de covid.

Cette histoire touche à de nombreux concepts : confidentialité et anonymisation des données, éthique de la recherche, privilège chercheur-participant. Or, deux autres aspects ont jusqu’à présent été occultés, soit la gestion documentaire et la gestion des données de recherche. Ce n’est d’ailleurs qu’à la fin de son livre que Mme Maillé déclare :

« Note à tous les chercheurs et chercheuses : une fois les données transcrites, il ne sert ABSOLUMENT à rien de conserver vos fichiers audio. Pas plus que vos formulaires originaux d’entrevues. Pas plus que vos questionnaires. Pas plus que vos journaux de bord, etc. » (Maillé, 2018, p. 157).

Une bonne gestion documentaire s’appuie sur la sélection et la conservation des documents (et des données!) qui servent un projet en cours. Il pourrait arriver qu’un organisme subventionnaire vous oblige à conserver certaines données pendant une période précise (p. ex. en médecine ou en virologie) ou que vous souhaitiez le faire pour produire une étude longitudinale sur la population ou la dégradation d’un écosystème. Il se pourrait même que vos données deviennent intéressantes dans un autre contexte de recherche que vous n’aviez aucunement anticipé. Or, qui dit conservation dit aussi confidentialité et la confidentialité des données est une affaire de gestion de risque :

« Moi j’ai tout gardé! Comme un écureuil souffrant d’un trouble obsessif-compulsif! Et comme les écureuils, je ne retrouve qu’une infime partie des ressources que je cache pour plus tard, rendant l’exercice parfaitement inutile… et potentiellement dangereux, si d’autres que moi mettent la main sur mes provisions » (Maillé, 2018, p. 157).

Vous utilisez déjà plusieurs moyens pour gérer ce risque : des mots de passe, le verrouillage d’ordinateurs et de locaux, le cryptage de fichiers électroniques, le refus de consigner certaines données par écrit, par exemple les noms des personnes, ou la destruction de certains documents. Notons aussi l’encadrement du transfert de dossiers au moment où une étudiante quitte l’INRS en fin d’études ou les copies de sauvegarde qu’un agent de recherche effectue en cas de défaillance d’un ordinateur.

Au cours des prochains mois, j’offrirai des séances de formation sur divers aspects de la gestion des données de recherche à l’INRS pour vous aider à identifier ces éléments de risque et pour vous donner des conseils pratiques qui vous éviteront des problèmes. En tout temps, si vous avez des questions ou que vous avez besoin de conseils sur l’organisation, la description, la conservation, la préservation ou la confidentialité de vos données de recherche, n’hésitez pas à communiquer avec moi à gdr@inrs.ca.

 

Jonathan Dorey, Agent de recherche / Gestion des données de recherche / INRS ENAP TELUQ

 

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Photo : Harvey McDaniel from Naalehu, HI / CC BY via Wikimedia Copmmons

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