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Géopolitique et eau : La guerre du Nil aura-t-elle lieu?

Autour de nous | Jean-Daniel Bourgault | Affiché 2092 fois | Publié le vendredi 31 mai 2013 à 07:06


Le 28 mai dernier, l'Éthiopie a commencé la diversion des eaux du Nil bleu afin d'y construire un gigantesque barrage (Grand Ethiopian Renaissance Dam), une décision qui risque d'affecter lourdement la sécurité de l'approvisionnement en eau de l'Égypte, un pays déjà lourdement déficitaire en cette matière et aux prises avec une crise politique et économique complexe. Quatre-vingt-cinq pour cent des eaux du Nil proviennent de l'Éthiopie et pourtant, à ce jour, ce pays n'utilisait que très peu ces eaux.

Cette situation découle d'un accord datant l'époque coloniale sous protectorat britannique (1929), qui accorde à l'Égypte 55,5 milliards m³ et au Soudan, également situé en amont, 18,5 milliards m³. Dix milliards de m³ sont aussi perdus par évaporation. La décision éthiopienne vient donc remettre en question un équilibre qui ne tenait aucunement compte de ce pays ni des huit autres qui bordent les 6700 km du grand fleuve et de ses affluents. L'Éthiopie est le leader d'un groupe de 5 nations qui menacent de signer un nouvel accord de coopération sans l'Égypte et le Soudan en prenant le contrôle de facto des eaux du Nil.

La problématique est complexe, car, selon plusieurs experts, l'Égypte souffre déjà d'une pauvreté en eau, soit  640 m³ par individu contre une moyenne internationale de 1000 m³. Selon d'autres experts, l'Égypte pourrait perdre jusqu'à 15 milliards de m³, soit 27 % de son prélèvement annuel, pour chacune des années que le barrage Éthiopien prendra pour remplir son réservoir. Or la quantité d'eau actuelle n'est déjà pas suffisante pour sa population en croissance très rapide (27 millions en 1960, 78 millions en 2006, des prévisions de 120 millions pour 2040...). L'Égypte perdrait aussi de 30 à 40 pour cent de sa capacité hydroélectrique. Enfin, attendu la taille immense du barrage éthiopien, il pourrait se perdre par évaporation, chaque année, jusqu'à 3 milliards de m³ supplémentaires.

Le barrage, qui est complété à 20 % et devrait être terminé en 2015, est situé à 60 km de la frontière du Soudan et aura une capacité de stockage de 74 millions de m³ afin de générer 6000 Mégawatts , soit 30 % de plus que ce qui est produit au barrage égyptien d'Assouan, construit sur le Nil dans les années 1960.

Pour le moment, l'escalade militaire semble exclue.

 

Pour en savoir plus :

Bouazza N (30 mai 2013) La "guerre du Nil" relancée entre l'Égypte et l'Éthiopie. SlateAfrique

Tensions autour du partage des eaux du Nil. Geopolitis21

AP (30 mai 2013) Egypt fears grow as Ethiopia builds giant Nile dam. CBC News

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